Dépasser la maladie mentale pour comprendre la situation de handicap psychique
« Quitte à être stigmatisé, autant emprunter le label « handicap psychique » que celui de malade mental (…). La société, les usagers, les familles, tous sont plus effrayés par la folie que par le handicap » (Bauduret, 2016) ! En théorie, des années de sensibilisations et de formations ont construit une représentation sociale positive de la grande diversité des situations handicapantes.
En pratique, la réalité et ses enjeux sont clairs : en France, tandis que 1,2 million de personnes bénéficiait d’un suivi psychiatrique (Milon, 2009), 12 à 13 millions présenteraient des troubles psychiques, soit 18 % de la population (Fondation de France, 2018 ; Observatoire sur la santé mentale, 2021).
Ces dysfonctionnements de la personnalité, d’origine mentale, ont des impacts lourds en termes humain, social, économique ou sanitaire.
Se déclarant généralement entre 15 et 25 ans, elles compromettent la vie privée et professionnelle des jeunes patients et de leur entourage. Souvent tu, honteux et tabou, ce handicap invisible se caractérise par des perturbations graves, chroniques ou durables du comportement et de l’adaptation sociale (Zribi, 2003).
Les symptômes impactent les capacités d’autonomie et d’adaptation des personnes dans leurs interactions sociales, dans leur vie quotidienne et socioprofessionnelle (notamment une reconnaissance administrative).
Le handicap psychique dans la vie professionnelle
La question du handicap psychique est fondamentale pour deux raisons essentielles. Il peut être une conséquence directe du travail (burn, brown et bore out), déclenchant des dépressions sévères et des incapacités proportionnelles.
Inversement, les organisations peuvent aussi l’aggraver, de manière plus indirecte, en générant une atmosphère propice aux déclenchements des symptômes (avec une affectation des performances cognitives au niveau de la concentration et de la compréhension, une augmentation de la souffrance, une détérioration de la santé mentale).
Il s’agit d’une véritable problématique dont les entreprises doivent se saisir durablement puisqu’elles sont à la fois productrices de ces situations et victimes de leurs conséquences.
L’étude IMS « Entreprendre Pour la Cité » (2011), réalisée au sein d’entreprises leaders (l’Oréal, Alstom, Areva et CNP Assurance), nous alertait déjà sur leurs réalités. Alors que toutes s’étaient lancées dans l’application des lois de 1987 et de 2005 pour faciliter l’emploi de PSH, un grand nombre de leurs managers déclaraient éprouver des difficultés dans le recrutement de ce type de travailleurs.
Aujourd’hui, rien n’a changé puisque 85 % des recruteurs et 78% des salariés considèrent le handicap psychique comme difficile à intégrer dans une entreprise (Baromètre Agefiph -Ifop, 2022).
Un changement de paradigme et de posture nécessaire, à ancrer dans le long terme
Dans le cadre d’un monde professionnel inclusif, le travail et son environnement devraient être désirables et un réel objectif pour permettre à chacun d’atteindre une autonomie globale.
Pour intégrer ces salariés contraints d’emprunter un chemin non linéaire, jamais terminé et incluant des rechutes, les parties prenantes doivent rester engagées et garder quotidiennement une vision positive de l’avenir.
Sachant que ces troubles peuvent concerner n’importe qui, n’importe quand, le handicap psychique dans le milieu du travail doit être abordé urgemment dans les politiques RH des entreprises.
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